vendredi 6 novembre 2009

Tremblement de terre


Le 25 novembre 1988, à 18h46, l’est du Canada enregistrait son plus important séisme en 60 ans, un tremblement de terre de magnitude 5,9 sur l’échelle Richter allait semer l’émoi chez plusieurs résidents du Québec. Son épicentre était situé à 50 kilomètres au sud de Chicoutimi, mais fut ressenti à plus 2000 kilomètres jusqu’à Montréal et Washington.

Voilà ce que rapporte le journal Le Soleil d’aujourd’hui, vingt ans plus tard jour pour jour.

Souvenir

Je me souviens de cet événement comme s’il était arrivé hier. Des détails sont inscrits dans ma mémoire auditive, visuelle et émotive tant le choc fut grand pour Claude et moi.

La veille une secousse brève nous avait réveillés au cœur de la nuit. Premier signe avant-coureur. La pleine magnitude du séisme est survenue quinze heures plus tard.

Je suis à peindre dans mon atelier au sous-sol de notre maison à Jonquière lorsque j’entends un grondement sourd. Surréaliste, cela ressemble aux roulements des tanks soviétiques entrant à Prague dans le film l’insoutenable légèreté de l’être que je viens de voir au cinéma.

Les secousses augmentent sous mes pieds. La lumière s’éteint. Claude me crie de monter. Alors qu’à quatre pattes j’escalade l’escalier, j’entends le tintamarre de la vaisselle qui tombe des armoires. Nous nous retrouvons rapidement dehors dans le jardin. Nous sommes là enlacés. Je crains que la terre s’ouvre devant nous pour nous engloutir comme dans une scène apocalyptique.

Fin des secousses. Atmosphère étrange. Odeur de souffre.


Dans la rue

Machinalement nous allons dans la rue obscure en silence. Une femme affolée court et crie : Fernand, Fernand! Où es-tu Fernand? Nous apprenons que le Fernand dès les premières secousses est sorti de la maison, a sauté dans son auto et a déguerpi.

Un voisin dit : Chez moi, la cheminée s’est effondrée avec fracas par l’intérieur et ma femme est sous le choc. Un autre arrive en camionnette et demande tout bonnement depuis quand l’électricité est en panne. En roulant il n’a rien senti.

Des voix inaudibles nous parviennent de-ci de-là. Progressivement les gens rentrent chez eux. Nous faisons de même.

Le premier regard de Claude est pour la bibliothèque. Il y était assis au début du tremblement de terre. Il se souvient avoir entendu tomber des livres. Une grande étagère à la dimension d’un mûr est déplacée de sa base et tient en équilibre précaire. Il l’a échappé belle!

Le téléphone est coupé. L’électricité aussi. La radio donne constamment des nouvelles du séisme saguenéen. Nous pensons à nos enfants de Montréal qui doivent s’inquiéter.


François

En fin de soirée les communications reviennent. François est le premier à nous joindre. Il s’enquière de la situation de ses parents.

— Nous allons bien et il nous semble que nous n’ayons que des bris à la bibliothèque.

— J’arrive !


Cinq heures plus tard François était à la maison avec… son coffre à outils. Ce geste d’amour filial nous a si touchés que c’est encore avec émotion que je l’évoque.


Épilogue

Tout compte fait, nous sommes sortis chanceux de cette aventure. D’autres au Saguenay ont subi des dommages matériels considérables et certains des séquelles psychologiques qui ont pris du temps à se résorber. Celle qui cherchait son Fernand tomba dans une psychose dont elle ne s’est jamais remise.

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